Publié le 14/05/2015 à 12h00 – Par Ghislain Annetta
Avec plus de 30 CD à son actif et des concerts en Europe, en Afrique, aux Antilles, au Brésil et à Cuba, Guem n’a plus à prouver ni son talent ni sa passion pour le rythme et la percussion. À 68 ans, il continue à enseigner la musique, la danse africaine et à partager sa passion sur scène. Celui qui depuis 1970 rend la percussion mélodique a répondu à nos questions. Entretien.
Vous êtes né en Algérie et avez grandi dans une famille de musiciens qui pratiquait le diwan. De quoi s’agit-il ?
En Algérie, le diwan est une musique de transe, comme le stambali en Tunisie, le macumba au Brésil ou le gnawa au Maroc. C’est une tradition qui réunissait ma famille pour invoquer les ancêtres. Il faut connaître le diwan pour comprendre et ne pas en avoir peur. C’est avant tout un rassemblement joyeux dont la tradition se perpétue toujours aujourd’hui.
Vous démontrez que la percussion peut être mélodique. Un pari audacieux mais réussi. D’où vous est venue cette idée ?
Au début de ma carrière j’ai accompagné de nombreux groupes. J’entendais souvent dire que les percussionnistes ne sont pas de vrais musiciens alors j’ai voulu prouver le contraire. J’ai accordé différemment mes instruments (conga, djembé, batterie, bongo, darbouka, cloches, etc.) et j’ai présenté la percussion autrement.
Que cherchez-vous avec la percussion que vous ne trouvez pas dans d’autres instruments ?
Je joue de la guitare, du violon et du luth oriental pour le plaisir mais ce qui m’intéresse, c’est la musique sans frontière. Le rythme est universel ! Le premier instrument est le corps humain et le rythme, c’est la vie. Ma musique, c’est une recherche sur l’origine.
Cette quête de racines communes aux rythmes a occupé une place importante dans votre parcours de musicien ?
J’ai de lointaines origines nigérianes. Mes arrière-grands-parents sont arrivés en Afrique du nord comme esclaves. À travers la percussion je cherchais des racines. Je suis allé au Brésil, en Haïti. La musique des esclaves part toujours du même rythme comme point de départ. Chaque pays a développé des instruments différents mais le rythme reste le même.
Quelle est la particularité de la percussion ?
Chaque instrument a sa technique mais l’approche des percussions est plus facile. Il suffit de taper pour sortir un son. La difficulté vient lorsque l’on cherche à évoluer dans son jeu. Il ne suffit alors plus de taper. Les nuances dans le travail de la main et les subtilités du toucher font tout le reste. Je suis un des seuls percussionnistes à ne pas avoir les mains abîmées. Elles sont douces, souples et puissantes. Avant, mes mains étaient comme des pierres. Je ne pouvais plus bouger les doigts. Avec certains instruments comme le darbouka, j’ai dû travailler pour obtenir une frappe claire et souple.
Vous venez jouer à Clères pour la troisième fois. Connaissez-vous bien notre région ?
J’ai vécu en Normandie dans les années 1960, quand je suis arrivé en France. Je venais gagner ma vie, comme tout le monde. Après un stage de tourneur fraiseur, j’ai travaillé à l’usine Renault de Cléon. J’ai joué pour la première fois en France à Elbeuf, dans un bal du 14 juillet. Ce jour-là le groupe m’a proposé de les accompagner et m’a confié les congas… C’était la première fois que j’essayais cet instrument.
E. Cortier / Source www.lecourriercauchois.fr